Je ne dormais plus. Je surveillais sa tension, son oxygène, ses pulsations. Mon bébé était en danger, j’étais en plein cauchemar.

Je suis maman de deux enfants. Un garçon de 10 ans et une fille de 6 ans. Je vais vous raconter l’épreuve terrible que des parents ne devraient jamais avoir à vivre. Tout commence par le mal à la tête dont se plaint ma fille. Rien d’anormal pour moi puisqu’elle a tendance à se plaindre de maux de tête de temps en temps. Je lui donne donc du Doliprane.

Marie témoigne pour sa fille Rose, 6 ans

Guillain-Barré à 6 ans

Des nuits de douleurs

Le soir même, elle se plaint de ses jambes, elle dit avoir de grosses douleurs dans les cuisses et les mollets. Je la prends donc avec moi pour dormir. La nuit est très difficile, elle pleure beaucoup malgré l’antalgique.

Le lendemain, pas d’appétit, toujours ses douleurs. J’appelle donc le médecin qui me donne un rendez-vous deux jours plus tard. Durant ces deux jours ma fille n’a pas beaucoup d’énergie, elle mange tout de même mais je n’arrive toujours pas à la soulager.

Arrive le jour du rendez-vous. Ma fille marche tout doucement. Elle me dit avoir mal aux jambes, elle a du mal à me suivre. Mon toubib annonce une sinusite, d’où ses maux de tête. Il ne relève pas ses douleurs aux jambes.

Cette nuit-là est la pire. Ma fille se tord de douleur et je décide de partir aux urgences. Mon mari me dit qu’elle est sous antibiotique et que ça devrait aller mieux. J’ai un mauvais pressentiment et regarder ma fille souffrir une minute de plus m’est insupportable. On est samedi, il est 6h30, je fonce à l’hôpital.

Les bilans se succèdent à l’hôpital

Après des heures d’attente, ma fille est vue en milieu d’après-midi. Le médecin veut l’ausculter mais elle pleure au moindre contact. Le médecin continue. On fait un bilan, on me dit que ma fille va bien, rien à la radio non plus. Ma fille ne sait plus tenir debout ni assise. On me garde pour la nuit.

Je n’irai pas dans les détails, mais je reste tout un week-end dans le service pédiatrique. On fait plusieurs bilans : RAS.

Une IRM que je dois arrêter en cours de route puisqu’on obligeait ma fille à rester dans une position qui la faisait souffrir. Une ponction lombaire avec trois infirmières sur ma fille pour la maintenir et la forcer.
Là aussi j’arrête tout. Ma fille n’a pas de tranquillisant et souffre le martyrs à chaque examen, prise de sang et même la prise de tension ne lui apporte que souffrance.

Je précise qu’elle a eu un dérivé morphinique toutes les 6 heures après que j’ai fortement insisté. Un infirmer m’a meme dit qu’elle était accros au médicament et quelle le réclamait pour planer… Durant ces deux jours, elle a souffert jours et nuits. Elle me suppliait de l’aider et je n’étais d’aucun secours. Un parent ne devrait pas voir son enfant vivre cet enfer. J’aurais voulu prendre sa place, mes caresses avaient l’air de la rassurer alors durant des heures avec le bout des doigts, très légèrement, je l’ai massée.

Je ne citerai pas le nom de cet hôpital, mais les infirmiers ne sont pas du tout compétents. Malgré les hurlements de ma fille, les soins étaient faits de force, les examens étaient faits à la dernière minute sans aucune explication, ni à moi ni à ma fille. Le seul médecin était perdu et ne comprenait pas ce qu’il se passait. J’ai donc demandé à le voir pour demander un transfert vers un autre hôpital.

Guillain-Barré : le diagnostic est posé dans un autre hôpital

Entre temps l’état de ma fille se dégrade. Voilà trois jours qu’elle ne mange pas. De la salive coule sur le côté de la bouche. Lorsqu’elle somnole, ses paupières ne se ferment plus totalement. Ma fille se paralyse. Elle reste recroquevillée sur elle-même. A part se plaindre de douleurs, elle ne réagit plus. A ce moment-là, je pense qu’elle gère au mieux cette situation qu’elle ne comprend pas.

Le médecin me propose une ambulance ! Je lui dis de venir voir ma fille, qu’il est hors de question de partir avec cette ambulance, qu’il faut un médecin avec moi durant ce trajet. Finalement c’est le SAMU qui nous accompagne. Je me vois encore dans ce camion, ma fille enveloppée d’un matelas d’air. Le moindre trou dans la route lui tiraille le corps. Mes larmes coulent mais je n’ai pas le droit de craquer, ma fille ne doit pas me voir pleurer.

Nous arrivons enfin dans un hôpital plus compétent. Une équipe de médecins nous attend déjà. Je fais le point sur ces derniers jours avec eux. Le médecin ordonne de soulager ma fille avec de la morphine car on ne laisse pas un enfant avoir mal ! ENFIN ! Dans les deux heures qui suivent, les docteurs ont enfin compris : le syndrome de Guillain-Barré ! On me demande quand ont commencé les premiers symptômes : mercredi. Il est temps d’agir. La paralysie est au niveau de la bouche, ma fille ne déglutit plus.

Les médecins font de leur mieux

On est installées en réanimation, ma fille sera mise sous sonde nasale. La moindre gorgée passe dans les poumons. La machine pour la ventiler est préparée en cas de besoin. Le médecin lui passe de gros antalgiques toutes les quatre heures. Tous les jours, nous devons ajouter un autre antalgique. Le drap sur son corps la fait gémir. Ses paupières sont tombantes, le Guillain-Barré est arrivé au bout de son ascension. Heureusement, elle n’aura pas besoin d’être ventilée. Je ne dormais plus, mes yeux étaient rivés sur les machines. Je surveillais sa tension, son oxygène, ses pulsations. Mon bébé était en danger, j’étais en plein cauchemar.

Quasi 15 jours en réanimation. Il n y a plus de danger, nous passons en neuro pédiatrique. Ma fille est paralysée, n’a aucun reflexe dans tout son corps. Elle a du mal à articuler et ses petites mains refusent d’écrire. Nous avons énormément de mal à nous comprendre. Elle fait pas mal de crise de nerfs. Elle a toujours mal et les docteurs ne trouvent rien pour la soulager. Je m’agace auprès d’eux. Ils font de leur mieux mais cela ne me suffit pas.

Durant ces autres semaines, Rose doit réaliser un scanner car on suspecte une tension dans le crâne. Il ne manquait plus que ça! Une IRM et une ponction lombaire, encore. Je tiens à remercier tous ses professionnels de santé qui ont su avoir les mots, la douceur, du cœur avec ma fille. Les soins n’étaient pas faits sous la contrainte. Ça devrait être comme ça partout.

Le Guillain-Barré laissera t-il des séquelles à ma fille ?

Pour terminer ce témoignage, deux mois se sont écoulés. Nous sommes dans un centre de rééducation. Ma fille est toujours alimentée par sonde, elle doit réapprendre à utiliser son corps. Elle voit kiné, ergo, orthophoniste, psychologique, médecin, infirmière tous les jours. Elle a même une heure d’école par jour sur place.

Elle est en fauteuil roulant. Il lui faudra du temps pour manger, marcher, écrire toute seule. C’est une battante, les enfants sont surprenant et plus fort que nous.

Si ma fille ne craque pas, alors moi non plus. J’ai arrêté de travailler durant cette épreuve. Il faudra du temps, mais elle y arrivera. Je prie pour qu’aucune séquelle ne reste. Je suis fière de ma fille, mon mari, mon fils. Chacun à notre façon, on se bat contre cette putain de maladie. Je vous aime tellement.