Moi qui était comme morte à cause du Guillain-Barré, je vis bien plus vite et plus fort que n’importe qui !
Et soudain le ciel vous tombe sur la tête. J’avais à peine six mois de mariage, encore étudiante en droit, la vie était belle. Trop peut-être, car en l’espace de 72 heures, mon paradis s’est transformé en enfer à cause du syndrome de Guillain-Barré.
Valérie, 44 ans
Guillain-Barré à 24 ans (en 1991)
Les fourmis m’envahissent
Nous sommes début mars, l’air est frais certes mais pas de quoi attraper la grippe. Ce week-end-là, nous devons partir à la campagne. Mais dans l’après midi du vendredi, je suis fatiguée au point de m’endormir en travers du lit et de laisser le sac poubelle sur le palier. D’ailleurs, lorsque mon mari rentre, il me dispute en disant que je suis cracra ! C’est vrai que cela ne me ressemble pas. Nous partons tout de même et c’est alors que des fourmis commencent à envahir mes pieds et mes mains. Elles ne cesseront plus avant bien des jours.
Le samedi se passe avec une très grande fatigue. Le dimanche, je veux rentrer chez moi à Paris ! Lorsque nous arrivons, mon mari va se garer et me suggère de rentrer tout de suite. Mais impossible d’ouvrir la porte ! Je pleure, je m’inquiète, tout devient bizarre. Dans la journée mes mains s’atrophient de plus en plus ! Je passe mon après midi à calmer mes nerfs en mangeant des bonbons. Et lorsque le soir arrive, je ne suis capable de tenir ma fourchette !
Je suis un pantin qui ne bouge plus
Le lendemain, je passe la journée avec mes parents qui m’accompagnent voir des médecins, faire des analyses… Le soir, c’est la panique. Mon mari rentre avec les résultats d’analyses, il sonne et sonne encore. Mais je ne peux ni me rendre à la porte, ni téléphoner (c’est un téléphone à cadran). Au secours !!! Je crie à mon mari que mes jambes ne me tiennent plus. Je m’accroche aux murs, aux portes, à tout ce qui est autour de moi et au bout de ce qui semble durer une éternité, j’ouvre enfin cette porte ! Mon mari panique et appelle son cousin médecin (fort mal aimable au demeurant) qui lui répond seulement que les résultats sont très mauvais. C’est grave et bye bye !
Par commodité, je passe la nuit chez mes parents. Et au petit matin… Je suis un pantin qui ne bouge plus. Je suis incapable de me laver les dents ou de me retourner dans le lit seule. Ça y est, c’est la fin ! Je supplie mes parents de m’accompagner à l’hôpital. Fous d’inquiétude, il appellent pour la dixième fois notre médecin qui décide de venir une nouvelle fois. Et là, il constate que le mal est foudroyant. On doit agir vite, même si on ne connait pas encore le nom de la maladie qui me ronge.
L’enfer du Guillain-Barré
Nous appelons les pompiers (mon père, ancien pompier de Paris nous a toujours dit de ne pas hésiter, qu’ils étaient les meilleurs du monde !) et ils arrivent avec un jeune médecin… très con ! Bah oui, je suis paralysée mais rien ne l’affole, il décide donc de ne pas me transporter car il n’y a pas d’urgence d’après lui. Nous faisons donc finalement appel à une ambulance privée, mais manque de bol, ce jour là l’ascenseur est en panne. Du coup, je descends les 5 étages dans les bras d’un ambulancier ! C’est une longue série d’humiliations, qui commence mais je n’en sais encore rien.
Ma chance est que je suis transportée à la Salpetrière, dans le service de l’un des seuls docteurs en France (à l’époque) dont le Guillain-Barré est le dada. Ensuite, tout va très vite. On m’ausculte, on me diagnostique la maladie, on m’informe sur ce qu’est cette polyradiculonévrite et deux heures après, me voila en réa. Je pleure et ne comprends pas pourquoi je dois y aller… Le lendemain, je suis tétra avec en prime une atteinte au cœur, aux poumons et au visage. Pour moi, c’est fini la vie m’abandonne !
Comme morte à cause du Guillain-Barré mais je vis plus fort
Je n’ai jamais tant pleuré, prié, espéré. Je voulais partir si tout devait continuer comme cela, mais l’amour de mes proches et ma forte volonté ont fait que 4 semaines plus tard, j’étais extubée et vivante ! Ensuite, ce fut dur mais rapide. Le 14 mai, jour de mes 25 ans, je marchais. Avec une canne, certes, mais je marchais !
Au mois de juin, plus aucune trace de cette maladie si ce n’est des séquelles sur mon visage ! 20 plus tard mon visage à bien récupéré mais pas totalement…
Au début c’est dur, mais maintenant, cela fait parti de moi. J’ai la chance d’avoir eu trois merveilleux enfants et plus rien n’est pareil depuis cette maladie qui a profondément modifié ma façon de voir la vie, qui est si belle.
Je veux dire à ceux qui sont désespérés de garder espoir. Notre corps est une machine magnifique ! Moi qui était comme morte, je vis bien plus vite et plus fort que n’importe qui ! J’ai juste compris qu’il faut aller à l’essentiel et jouir de la vie même si nous gardons des cicatrices de ces moments douloureux où nous étions prisonnier de notre cerveau (pour moi le manque de communication fut le plus dur !).
Je porterai toujours les souvenirs du Guillain-Barré en moi, cela fait parti de moi.