Parfois, j’aimerais être comme avant l’espace de 5 minutes pour me rappeler comment c’était avant le syndrome de Guillain et Barré.

Le syndrome de Guillain et Barré s’est déclaré chez moi à 23 ans. J’ai un recul de 4 ans maintenant sur cette maladie qui maintenant fait partie de moi. J’ai été diagnostiqué au bout de 3 semaines d’alitement et d’agonie dans mon lit chez moi. Je me sentais MOURIR à petit feu. Cela à été un vrai calvaire. Les médecins ont cherché dans tous les sens : mononucléose, grippe virale, VIH… et pendant ce temps, mon état empirait.

Delphine, 27 ans

Guillain-Barré à 23 ans (en 2003)

L’éventualité du syndrome de Guillain et Barré

Au bout de 3 semaines, je ne marchais plus et j’étais dans un état de fatigue très important. Je suis retournée une nouvelle fois chez mon généraliste et quand il a vu la manière dont je me déplaçais, il a mis une éventualité sur le syndrome de Guillain et Barré. j’ai été transférée aussitôt aux urgences.
Lors de mon hospitalisation, ma santé a encore décliné et ils m’ont transférée en réanimation où ils m’ont mis une pile au cœur, car je brachycardais beaucoup trop..

La réa : pas d’hospitalisation pire que celle-là quand on est conscient ! Après la réa, quand je suis retournée en neuro et que je me suis vue dans un miroir, j’ai eu peur. Je ne me reconnaissais plus.
J’avais des douleurs indescriptibles que seuls ceux qui sont passés par là peuvent comprendre. J’ai été paralysée des 4 membres, du tronc, de la nuque et quand ils ont commencé à me soigner, ça montait jusqu’au joues.

La souffrance et la douleur à leur paroxysme

Quand le syndrome de Guillain et Barré a été confirmé, j’ai été traité par immunoglobulines. Les médecins voyaient que je perdais le moral et me mentaient sur ma date éventuelle de sortie. J’ai piqué des crises de nerfs. Je pensais que j’avais atteint le sommet de la souffrance et de la douleur. Aujourd’hui, je pense que la souffrance morale que j’ai eu a laissé des traces plus importantes que les séquelles physiques que j’ai aujourd’hui. Je me suis sentie à la place de l’handicapé en fauteuil roulant que l’on ose pas regarder en face quand on le croise dans la rue.

Je me sentais inférieure et petite

Au début de ma rééducation, j’en voulais à la terre entière de se plaindre de petits maux alors que moi j’étais un légume. Mais j’ai eu une kiné hors pair qui a su me motiver quand je trouvais que ça n’allait pas assez vite au niveau des progrès. Elle a été là pour me relever lorsque je tombais pendant les exercices. Je ne l’oublierai jamais, elle m’a ré-appris à marcher, à courir, à sauter, à me brosser les cheveux, à tendre les bras, à retrouver le sourire. Je me sentais tellement inférieure et petite, comme un bébé. Je ne peux plus décrire aux gens mes souffrances, car je ne veux plus m’en souvenir et j’oublie.

Je suis aujourd’hui plus tolérante que je ne l’ai jamais été. Je voudrais dire aux gens qui sont en train de traverser cette difficile expérience que pour moi, le mental a été mon seul allié. Même si j’ai été très entourée par mes proches, quand je perdais espoir, personne ne pouvait me réconforter. Je me sentais moins que rien. J’ai du prendre sur moi encore et encore pour tous les efforts physiques que j’ai fournis lors de la rééducation. Ça été très long : 2 ans avant que je me sente à nouveau bien dans ce nouveau corps. Personne ne peut comprendre ce qu’on ressent.

Vivre avec les séquelles du syndrome de Guillain et Barré

Aujourd’hui, je manque encore d’endurance et de force physique. Les souvenirs des douleurs se sont estompés mais la galère que j’ai vécue reste ancrée dans ma mémoire pour toujours. J’en suis peut être plus forte mentalement maintenant car tous les matins je me réveille en me disant que j’ai la chance d’avoir l’usage de mes membres. La santé est ce qu’il y a de plus précieux pour moi. Mais je pense à cette maladie chaque jour.

J’ai des séquelles qui ne partiront plus ou que je n’ai plus espoir qu’elles partent. J’ai appris à vivre avec. Parfois, j’aimerais juste être comme avant l’espace de 5 minutes pour me rappeler comment c’était. J’ai des paresthésies dans les pieds et dans les mains, une aréflexie (absence de réflexes) tendineuse complète et une sensibilité aux pieds très importante, un manque d’équilibre assez prononcé. Je n’ose plus danser ou patiner, c’est sur ça ne se voit pas mais ça ne s’explique pas non plus.

J’ai aujourd’hui 27 ans, je croque la vie avant que ce ne soit elle qui me croque. Je pense que mon cerveau à plus souffert que mon corps. J’ai une plaie dans mon cœur qui ne cicatrisera pas car je reste à jamais meurtrie, mais j’ai appris à vivre avec. Personne ne peut panser cette blessure.