« Je crois savoir ce dont vous êtes atteint… C’est le syndrome de Guillain-Barré. Une maladie rare, j’ai eu un cas il y a environ 6 ans. »
Guy, 57 ans
Guillain-Barré à 56 ans
Dimanche 7 novembre 2004. Premier symptôme de la maladie, au moment du coucher. Lorsque j’ai voulu enfiler le pyjama, je me suis aperçu que je ne tenais pas l’équilibre sur une jambe. Après plusieurs tentatives qui se sont avérées vaines, je me suis assis sur le lit, enfilé le pyjama et ce petit incident a été oublié pour la nuit.
Mes forces disparaissent
Lundi 8 novembre 2004 au matin, mes doigts et mes pieds sont légèrement engourdis mais je n’y prête pas particulièrement attention je pense que cela est dû à une fatigue générale. A 11 heures je prends la voiture afin de me rendre dans deux villages voisins pour aller chercher des cousines qui venaient nous rendre visite. La journée se passe bien mais déjà, je sens que mes pieds et mains répondent moins bien et s’engourdissent de plus en plus. Vers 15 heures je décide d’aller planter 3 bouleaux qui m’avaient été amenés par un copain. Je prends le matériel : pioche, pelle, piquets et masse et je me mets au travail. La terre est dure et il faut que je me mette à genoux pour effectuer ce travail, je n’ai déjà plus de force. Les arbres sont plantés tant bien que mal, (plutôt mal car ils n’ont pas pris) et je rentre me reposer. La démarche est de plus en plus difficile.
Le Guillain-Barré : une maladie rare
Mardi 9 novembre 2004. Au lever, ma démarche est hésitante et mes mains n’ont déjà plus la force pour couper le pain du petit déjeuner. Vers 11 heures, nous appelons le médecin pour prendre rendez-vous. Le docteur ne se déplace que pour des urgences et nous donne rendez-vous pour 17 heures. A 16 heures trente, nous prenons la voiture (je ne peux déjà plus conduire) et nous nous rendons chez le docteur. Celui-ci nous fait rentrer dans son cabinet, je lui explique mes symptômes, lui fait part de ma dernière maladie une gastro-entérite contractée une semaine plutôt et qui avait durée 48 h environ. Auscultations, questions du docteur et au bout d’environ 10 minutes il nous dit : « Je crois savoir ce dont vous êtes atteint… C’est le syndrome de Guillain-Barré. C’est une maladie très rare, j’ai eu un cas il y a environ 6 ans… Je vous envoie dès ce soir à l’hôpital pour confirmation du diagnostic. »
Départ pour les urgences de l’hôpital, le docteur avait déjà téléphoné. Prise en charge par les urgences, examen, prise de sang, ponction lombaire et le diagnostic n’est pas particulièrement confirmé car le résultat de la ponction n’est pas probant (c’était un peu tôt, une ponction lombaire faite quelques jours plus tard permis de confirmer le diagnostic avec certitude). Je suis hospitalisé en neurologie pour la nuit.
Traitement : les immunoglobulines
Mercredi 10 novembre. Je suis au lit. Je ne souffre pas mais je ne marche déjà plus, mes mains ne fonctionnent pas. J’arrive à me maintenir assis sur le lit avec de l’aide. Je dois voir le neurologue dans l’après-midi. Il vient me rendre visite vers 19 heures et me confirme qu’il s’agit bien du syndrome de Guillain-Barré. Il faut rechercher le médicament : des immunoglobulines, mais il n’en dispose pas sur place, et il faut les faire venir d’un autre hôpital : Clermont ? Limoges ? Le neurologue m’annonce qu’il est possible que je sois amené en réanimation dans la nuit car la maladie peut évoluer vers les poumons, la tête… auquel cas il faudrait procéder à une intubation ou une trachéotomie pour m’aider à respirer.
Jeudi 11novembre. A 9 heures, le médicament est là. 5 doses en transfusion par voies intraveineuses pendant 5 jours et le neurologue m’assure que dimanche je serai guéri. Pour moi, être guéri cela voulait dire se lever et partir de l’hôpital…
Vendredi, samedi. Surveillance de l’évolution de la maladie, apparemment celle-ci s’est arrêtée aux membres inférieurs et supérieurs.
Dimanche 14 novembre. Le traitement est pratiquement terminé et je ne sens aucune amélioration au niveau de la mobilité des membres. Je ne ressens aucune souffrance physique (sauf les jambes, quelques douleurs neurologiques).
Démyélinisation avec atteinte de l’axone
Lundi 15 novembre. Je suis déçu car je ne peux pas sortir, le neurologue m’explique la maladie. Polyradiculonévrite démyélinisante aigue… Maladie auto-immune… Phase d’extension des paralysies environ 5 à 10 jours ….Phase plateau durée variable et phase de récupération indéterminée… Je dois voir une kiné de l’hôpital pour faire de la rééducation et ensuite partir en maison de rééducation pour une durée indéterminée (on ne parle jamais de durée ou on en parle, mais on est très évasif).
Ce jour, le neurologue me passe un électromyogramme. Les dégâts sont plus importants que prévus : démyélinisation avec atteinte de l’axone. C’est une forme plus motrice que sensitive (en effet, j’ai conservé toute la sensibilité tant aux mains qu’aux pieds. Le neurologue m’assure avec force que je récupérerai mes fonctions à 100% … Mais il faudra du temps…).
Ma musculature fond à vue d’œil
Mardi 16 novembre. Je vois la kiné pour la première fois (elle est kiné mais pas psychologue !) elle me demande, entre autre chose, si j’ai pensé à mon futur état d’handicapé…. C’est bon pour le moral !
Mercredi 17 et jusqu’au 2 décembre. Une demi-heure de kiné par jour. Première chute ; il y en aura d’autres. Difficultés pour se rendre au toilettes (il faut 2 ou 3 personnes, je suis un poids mort), pour s’asseoir sur un fauteuil roulant, pour se remettre au lit, pour manger, se laver, se laver les dents, pour lire (je ne peux plus tenir un livre ni une feuille de papier). Aucune mobilité des doigts de pieds, des mains, aucune force dans les bras. Ma musculature fond à vue d’œil. J’ai perdu 13 kg en 1 mois.
Jeudi 2 décembre. Départ en ambulance pour le centre de rééducation à Chamalières. Fauteuil roulant, rééducation, mais peu de progrès au niveau des jambes. Toutefois en quelques jours et avec beaucoup de temps d’efforts et de patience, j’arrive à me laver m’habiller et manger seul. Cela fait partie de la rééducation.
Rééducation et ergothérapie encore et encore
Vendredi 24 décembre. Premier retour à la maison les difficultés commencent : fauteuil roulant qui ne passe pas dans toutes les portes : W.C., salle de bain. Les escaliers : il faut me porter jusqu’au 1er étage, me redescendre, me porter dans la voiture… C’est un peu la galère.
Mi-janvier. Avant de marcher, je commence à faire du vélo d’appartement, il faut me monter sur le vélo, mais ça fait du bien de pouvoir remuer ses jambes. Puis on m’aide à me lever et à marcher entre les barres parallèles. Mais que de chutes ! Ensuite c’est un peu de musculation : jambes, bras, piscine avec de l’eau à 34 degrés. Puis la force revient légèrement. J’arrive à me lever de sur le fauteuil, faire pipi tout seul, mais je ne marche pas encore. Rééducation encore et encore, ergothérapie : tous les jours. Mes doigts commencent à re-fonctionner, mes orteils semblent bouger mais on dirait qu’ils sont pris dans une chape de béton.
Des cannes et une rééducation intensive
20 janvier 2005. Je fais quelques pas avec un déambulateur je prends confiance.
26 janvier 2005. J’ai des cannes anglaises, l’apprentissage est dur car je n’ai pas d’équilibre.
28 janvier 2005. Je pars du centre de rééducation avec les cannes anglaises pour le week-end
31 janvier 2005. Je rends le fauteuil roulant (avec plaisir) et ne me déplace qu’avec les cannes. Je continue une rééducation intensive jusqu’au mercredi 23 mars 2005 où le docteur de l’établissement m’autorise à sortir définitivement avec toutefois des séances de kiné 3 fois par semaine.
L’équilibre est mieux mais ce n’est pas encore la panacée
23 mars 2005. Sortie… et première chute en ville. Je butte sur une pierre malgré ma canne anglaise. Dans la maison je me déplace sans canne car je me tiens aux meubles et aux murs. Je monte les escaliers avec difficultés en m’aidant de deux rampes. Difficultés également pour me lever de sur une chaise et impossibilité de me lever du canapé (il est trop bas). Je continue ma rééducation chez la kiné et tout seul : rameur, vélo d’appartement et tapis de marche. Je n’ai toujours pas d’équilibre sur mes jambes. Mes doigts et orteils sont de plus en plus mobiles ainsi que les chevilles, coudes et bras.
23 juillet 2005. 4 mois après la sortie de rééducation et 8 mois après le début de la maladie de Guillain-Barré. Je reconduis la voiture depuis fin avril. Je tiens mieux sur mes jambes, mes orteils bougent de plus en plus mes chevilles et genoux commencent à prendre de la force. Ma démarche est mieux assurée, mais j’ai une déficience aux pieds côté releveurs. L’équilibre c’est un peu mieux mais ce n’est pas encore la panacée. Je me déplace sans canne, sauf si je dois marcher longuement, en ville ou dans un magasin. C’est plus une sécurité qu’une aide.
Côté mains, malgré une meilleure mobilité, un tremblement des doigts est apparu, c’est assez gênant. Je me lève sans difficulté de sur une chaise ou de sur le canapé. Je continue ma rééducation marche sur tapis, vélo, et vais chez kiné 3 jours par semaine.