Je ne suis plus sous assistance ventilée, je plie mes doigts, mon visage est normal. La récupération du Guillain-Barré a débuté.

Le 3 août 2004, je rentre de mon travail. Je suis étudiant et je fais la saison. Je ressens des fourmis dans les pieds. Ma première réaction est de me dire que lorsque je ne m’assiérai plus n’importe comment, je ne sentirai plus de fourmillements. Le lendemain je vais travailler et une douleur à l’épaule m’oblige à consulter un médecin.

Clément, 20 ans

Guillain-Barré à 19 ans (en 2004)

Depuis les fourmillements jusqu’à la ponction lombaire

Je parle des mes fourmillements au médecin et je lui explique qu’ils sont plus intenses que la veille : il diagnostique une sciatique et me prescrit des anti-inflammatoires en m’assurant qu’ils agiront également pour ma douleur à l’épaule. Je finis donc la journée à la maison et ces fourmillements s’accentuent de plus en plus. Le soir, je commence à en sentir dans les mains, je trouve que l’eau a un drôle de goût et que les tomates du jardin sont infectes !!!

Dans la nuit du 4 au 5, je me lève pour aller aux w.-c. Ne me sentant pas bien, je réveille mes parents. Ma mère et moi décidons d’aller consulter aux urgences de l’hôpital de Perpignan. Après consultation, on me place dans le service neurologie. Refusant absolument l’aide du personnel, au petit matin, je me lève, vais à la salle de bains et tombe sans arriver à me relever. Le neurologue arrive quelques instants plus tard pour me faire subir une ponction lombaire.

Je suis atteint d’un syndrome de Guillain-Barré

Mon état empirant, on décide de me transférer en soins intensifs. Le diagnostic est confirmé : je suis atteint d’un syndrome de Guillain-Barré. On me demande si j’ai subi un vaccin auparavant, et/ou sentit un état de fatigue. Pour ma part j’ai ressenti une grosse fatigue mais quoi de plus normal alors que je viens de perdre 23 kilos en 2 mois grâce à un régime draconien suivi 4 mois auparavant. Je travaillais presque 50 heures par semaine et je ne trouvais rien de plus malin que de sortir tous les soirs en me couchant à quatre heures du matin et en me levant à six pour aller travailler.

Mon état s’aggrave jusqu’à la paralysie faciale

On m’explique que, petit à petit, je vais perdre certaines de mes capacités et que la rééducation m’aidera à les récupérer plus tard. On me fait des injections me précisant que cela devrait aider à stopper la maladie. Selon mes médecins, 5 jours en soins intensifs, quelques jours en observations et 3 mois en rééducation devraient résoudre le problème. Hélas, le 9 août, mon état empirant, on décide de me transférer en réanimation médicale afin de m’y intuber. Mon état s’aggrave jusqu’à la paralysie faciale et une forte dégradation de ma vue. J’y resterai trois mois.

Début de la récupération de mon Guillain-Barré

Début novembre, je quitte la réanimation pour un centre de rééducation à Cerbère : je ne suis plus sous assistance ventilée, mon visage a entièrement récupéré, je commence à plier mes doigts, et soulève légèrement les épaules.

A partir de ce jour-là un grand changement s’amorce : fini la déprime, je vais enfin recevoir davantage de soins, car le centre est bien plus capable de me faire travailler n’étant plus respirateur. Je fais le voyage en hélicoptère (quel pied !!! C’en est mon meilleur souvenir). Toujours « trachéotomisé », on décide de me poser une trachéotomie parlante, je peux enfin m’exprimer normalement !!! Yes !!! Grâce à ma kiné et mon ergothérapeute, je comprends que je suis le seul cas de cette maladie dans le centre. J’en profite : je sers pour de nombreux stagiaires de sujet pour leur dossier mémoire, ainsi je vais jusqu’à tripler mon temps de rééducation. Je progresse alors de jours en jours. Ce n’est pas une façon de parler : la récupération de mon Guillain-Barré est vraiment frappante !

Mes premiers pas, 5 mois après le SGB

Petit à petit, je gagne en autonomie grâce à diverses adaptations. A partir de Noël je peux rentrer chez moi les week-end et je ne m’en prive pas.

Le 3 janvier 2005, je fais mes premiers pas. Je me rappellerai toujours de cette sensation, me suis senti grand, fier et ce fut pour moi le début de la fin. Je marche alors avec un déambulateur en kiné, mon médecin accepte de me laisser me déplacer de la sorte à condition de porter des releveurs en plastiques. Quelques semaines plus tard, le médecin part en congé et contre son avis, ma kiné et moi décidons de mettre le déambulateur au placard. Durant son absence, fin février, ce qui ne devait être qu’une consultation pour savoir si l’on pouvait retirer la trachéotomie s’est transformé en ablation de la dite trachéotomie, contre son avis, là encore. Dès lors, l’objectif devient le retour à domicile. Kiné et ergo y travaillent avec moi. Je progresse si vite que mes adaptations ne deviennent plus nécessaires d’un jour à l’autre.

Retour à la maison et à la (presque) normalité

Le 31 mars, une nouvelle page commence : je quitte mon centre de rééducation pour rentrer à la maison. Je vais trois fois par semaines dans le service de rééducation de l’hôpital pour mes soins.

Aujourd’hui nous sommes le 19 avril 2005, je reconduis normalement, mes troubles de l’équilibre sont quasi imperceptibles, suis totalement autonome, mes releveurs ne fonctionnent pas encore et il en est de même avec certains muscles de ma main droite mais heureusement, je suis gaucher. Je progresse encore, mais de façon moins flagrante, dirons-nous.

P.S. : j’aimerais remercier ma famille, mes amis, mes professeurs, ma classe, l’équipe de réanimation, mes kiné, mes ergo, et les médecins pour leur soutien moral, car se voir dépérir si rapidement est traumatisant. Je leur ai même demandé de m’administrer des doses létales morphine, avec le recul je les en remercie de ne m’avoir en aucun cas écouté. Je les remercie des nouveaux horizons qu’ils m’ont ouvert, et d’avoir tenu compte de mes envies pour définir un protocole de rééducation.